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Toute l’histoire sur le rachat de Nokia par Microsoft

Vous voulez connaître la vérité sur le rachat de Nokia par Microsoft ? Certains journalistes ont fait leur enquête, des langues se sont déliées, et une histoire en est ressortie. Ce n’est pas celle d’un compte de fées et la fin n’est pas heureuse pour tous ; mais elle permettra à chacun de comprendre dans quelles circonstances Nokia a cédé aux propositions de Microsoft.

 

Traduction de l’article de allthingsd
avec l’aide de Bruno 😉  

« Est ce qu’on peut parler ? » C’est ce que le PDG de Microsoft Steve Ballmer a dit dans un appel à la fin Janvier à Risto Siilasmaa, président du conseil d’administration chez Nokia.

La discussion- qui a eu lieu dans la matinée au siège de Microsoft à Redmond, Etat de Washigton et,  à la fin de la journée en Finlande, ou se trouve le siège social de Nokia, n’a duré seulement cinq minutes, avec comme seule décision de se rencontrer pour discuter lors du prochain Mobile World Congress à Barcelone.

Ces deux mots échangés étaient cependant très importants.

Malgré un solide partenariat entre les deux sociétés, Steve Ballme et d’autres personnes, ont été mal à l’aise face à la lenteur de l’adoption de Windows Phone auprès des consommateurs.

Cela est dû, en partie, au fait que Microsoft et Nokia ont tous deux investi beaucoup d’argent en marketing, pour attirer chacun les développeurs d’applications et mettre en avant leur marque. Les équipes d’ingénierie des deux entreprises ont également dupliqué leurs efforts dans certains domaines et étaient incapables de collaborer pleinement les uns avec les autres.

Le résultat, c’est que Windows Phone n’avait toujours que quelques pourcentages de part de marché, une situation qui a laissé Microsoft au bord de la route pendant que Google avec Android et Apple avec iOS continuaient d’avancer.

Peut-être plus important encore, avec des ventes faibles, l’avenir de Nokia en tant que société indépendante était en question ; à la fois son capital et ses performances financières étaient diminuées. La question clé qui se dressait était de savoir comment Nokia pouvait encore baisser – une situation qui était inquiétante pour Microsoft car Nokia aurait pu se tourner vers Android.

C’était intenable pour l’avenir de Windows Phone, il était donc temps de passer à l’étape supérieure.

La recherche d’une solution, est un processus qui a pris plus de huit mois et a impliqué une série de réunions de dirigeants de haut niveau à travers le monde, selon de multiples sources des deux sociétés interrogées dans le sillage de l’affaire.

Les pourparlers, qui parfois semblaient sur le point d’échouer, ont réussi à aboutir grâce à une grande persévérance, et à l’intervention inopinée d’une table basse en verre.

Le Mobile World Congress approchait, les équipes des deux sociétés ont essayé de faire une évaluation de ce qui fonctionnait et ne fonctionnait pas bien dans la société, et de réfléchir ensemble aux différentes options possibles.

A l’Hôtel Rey Juan Carlos de Barcelone, Steve Ballmer et Siilasmaa ont parlé pendant une heure, discutant des options possibles, allant de modifications mineures du partenariat existant jusqu’à un regroupement des deux entreprises.

Après cette réunion, et une poignée de main, Siilasmaa et Ballmer ont commencé à explorer un large éventail d’options possibles. Conscients du fait que les discussions pourraient éventuellement conduire à des pourparlers d’acquisition, Siilasmaa et le conseil d’administration de Nokia ont commencé à examiner toutes leurs possibilités – à la fois celles qui impliquaient Microsoft et celles qui ne l’impliquaient pas.

Des mois de va-et-vient s’en sont suivis, des négociations impliquant les principaux dirigeants des deux sociétés. Cependant, l’accord annoncé mardi en fin de compte peut être attribué à cette réunion de Barcelone et trois réunions suivantes, selon des sources proches des deux sociétés.

Cet accord, portait le nom de code projet médaille d’or, Microsoft se nommant Edwin Moses, et Nokia par le nom de code Paavo Johannes Nurmi (sprinteur médaillé 9 fois, connu sous le pseudonyme « The Flying Finn »)

Cependant, le chemin vers le succès était plus un parcours du combattant qu’un sprint.

Le 22 avril, Nokia et Microsoft se sont réunis dans les bureaux à New York de Skadden Arps Slate Meagher & Flom, un cabinet d’avocats. Nokia a été représenté par Siilasmaa, et Stephen Elop (PDG actuel de Nokia, qui était un ancien haut dirigeant de Microsoft) ainsi que l’avocate interne Louise Pentland et le directeur financier Timo Ihamuotila.

Du côté Microsoft, les principaux acteurs étaient Steve Ballmer, Terry Myerson (à la tête de la division Windows Phone), le directeur financier Peter Klein et le conseiller général Brad Smith.

Pour la réunion du 22 avril, cependant, Smith était en retard. Smith avait espéré être arrivé au début des discussions, mais ce n’était pas le cas. Ballmer passait un coup de fil et Pentland de Nokia, envoyait des messages texte.

Au moment où il est arrivé à la réunion, les choses se tournaient vers une impasse. Microsoft avait fait son offre et Nokia devait réfléchir à une réponse. Smith n’a eu qu’une dizaine de secondes pour être en petit comité avec Ballmer, Myerson et Klein avant que les deux parties ne se réunissent à nouveau.

Siilasmaa a passé environ 10 minutes à expliquer à Microsoft calmement et poliment que les deux parties étaient sur des planètes différentes quand il s’agit de faire une évaluation. Ballmer a répondu qu’il ne devait pas oublier dans quelle situation Nokia se trouvait aujourd’hui.

Après cela, les deux parties ont décidé qu’il était inutile d’aller plus loin. En petit comité dans une salle de conférence, Smith, avec ses collègues de Microsoft, s’est dirigé vers l’aéroport – Smith pensant en avoir terminé de ce qui était sûrement son plus court séjour à New York jamais effectué.

Alors que la réunion avait pris fin avec des choses qui semblaient être dans une impasse totale, Smith a suggéré à ses collègues de prendre leur journée puis de revenir. Chez Nokia, certains se sont demandés si les deux entreprises ne pouvaient pas être plus proche qu’il n’y paraissait.

Peut-être que les parties avaient fait une erreur en discutant de prix si tôt, surtout qu’il y avait beaucoup de pants  d’activités chez Nokia que Microsoft ne comprenait pas bien, et par conséquent, ne savait pas correctement les valoriser.

Le lendemain, le 23 Avril, Siilasmaa a envoyé un SMS à Steve Ballmer, suggérant qu’il y avait peut-être d’autres solutions inexplorées.

Une série de conférences téléphoniques ont conduit les deux sociétés à penser que quelque chose pouvait être possible, selon des sources proches. Les deux parties ont convenu de se rencontrer le week-end du 24 mai, cette fois dans les bureaux londoniens de Simpson, Thacher & Bartlett.

Le vendredi 24 mai, un accord potentiel commençait se dessiner. En soirée, Nokia et Microsoft ont été les seuls à rester dans le bâtiment. Chacun allait vers l’autre et cédait de petits bouts.

Ballmer et Smith se promenaient dans la salle de conférence ensemble, mais  ont disparu un moment et il s’en est suivi un grand cri ; le genre de cri qui ne sort que très rarement des poumons du PDG de Microsoft en colère.

Ce hurlement  surpris l’équipe de Nokia, qui pensait peut-être à une réaction négative de Ballmer à une de leurs propositions. L’équipe de Microsoft n’avaient aucune idée de ce qui se passait.

En vérité  Ballmer n’avait pas vu une table basse en verre clair et avait trébuché dessus, se cognant à la tête et laissant une entaille sur son front, juste au-dessus du sourcil.

Deux membres de l’équipe de sécurité de Microsoft ont couru à la recherche d’une trousse de premiers soins. Myerson  a envoyé un texto à l’équipe de Nokia pour leur faire savoir ce qui c’était passé.

A peine le pansement posé sur son front , Ballmer a voulu parler à Siilasmaa et Elop, qui était sorti de sa salle de conférence pour vérifier que tout allait bien.

De là, les deux équipes sont sorties dîner, un bandage sur le visage de Steve Ballmer.

Lorsque les deux parties sont retrouvées dans les mêmes bureaux le samedi matin, la table basse avait été déplacée du centre du hall de l’étage directement à côté d’une fenêtre, pour être ensuite totalement enlevée dans l’après midi.

Mais les négociations n’ont pas été aussi faciles qu’il n’y parait.

Un point de discordes concernait les activités de cartographie de Nokia. Siilasmaa a été inébranlable dans sa conviction que cette branche était vitale à Nokia, mais Microsoft avait le sentiment qu’il ne pouvait pas réussir à s’imposer sur le marché mobile sans contrôle de la technologie de localisation que Nokia utilisait.

Visant à voir s’ils pouvaient sortir de l’impasse, Smith et Steve Ballmer ont pris l’avion pour la Finlande, arrivant ainsi le vendredi 14 Juin.

Ils se sont rencontrés dans un bâtiment de Nokia dans une ville située à 30 kilomètres à l’ouest des bureaux de l’entreprise. Le bâtiment, qui a appartenu à l’armée russe,  possède un sauna, une piscine,  un pavillon de chasse, un vieux garage à trains et l’accès à la mer.

Pendant quelques heures, l’équipe de Microsoft a rencontré Siilasmaa et Elop. La réunion n’a pas abouti à une solution, mais les parties ont convenu de continuer à travailler dessus.

Au cours d’un dîner traditionnel finlandais, la conversation s’est éloignée de ce partenariat et s’est portée sur la NSA et l’histoire de PRISM qui faisait des vagues.

Vers 16h30, Ballmer et Smith étaient dans un avion pour les Etats-Unis.

Dès le mois de juillet, les deux parties ont décidé qu’il était temps de voir si un accord était possible ou, sinon, de passer à d’autres options. Pentland a tendu la main à Smith et a proposé une réunion.

Microsoft avait déjà beaucoup de cartes en main. Smith, Steve Ballmer et d’autres dirigeants de Microsoft étaient toujours en train de travailler sur une réorganisation majeure de l’entreprise. Nokia, de son côté, devait faire sa part du travail et acheter les parts restantes dans le joint venture Nokia Siemens Network…

Nokia et Microsoft ont accepté de se rencontrer à nouveau le 20 Juillet. Ils ont également décidé de restreindre la réunion à seulement huit principaux dirigeants : Ballmer, Myerson, Smith et Hood pour Microsoft et Siilasmaa, Elop, Pentland et Ihamuotila pour Nokia.

Il n’y avait toujours pas de véritable réponse sur la question de la cartographie. Ballmer était frustré de ne pas être en mesure de simplifier les choses suffisamment pour arriver à une solution. Il a comparé les applications de Microsoft à un réservoir et les données cartographiques de Nokia à un carburant, ce qui suggère que les deux étaient des ingrédients nécessaires.

Mais Microsoft n’est pas le seul réservoir qui a besoin de remplissage. Nokia voulait offrir sa cartographie à un large éventail de partenaires, y compris ceux de téléphones mobiles rivaux, voitures et autres dispositifs émergents. Microsoft, de son côté, voulait les cartes sur ses téléphones, ses tablettes, ses ordinateurs et le Web.

Au fur et à mesure des discussions, il leur est venu à l’esprit que peut-être ils n’ont pas besoin de séparés les activités de Nokia. Comme il s’agissait de logiciel, peut-être que les deux entreprises pourraient utiliser le même code. Nokia pourrait conserver la propriété intellectuelle, tandis que Microsoft a eu ce qu’on appelle les « droits équivalents à la propriété. »

Cela signifiait essentiellement que Microsoft pouvait utiliser les données cartographiques de Nokia à sa guise, en faisant le nécessaire sur l’application. Ballmer et Myerson ont eu un coup de fil avec Qi Lu (à la tête de Microsoft Online Services) pour savoir si cela avait un sens.

Cela pouvait fonctionner.

Après étude de la proposition, Siilasmaa se retourna vers Michael Halbherr, responsable de la section de cartographie de Nokia. À la fin de la réunion de New York, Steve Ballmer et Siilasmaa se serrèrent la main, mais à ce moment-là, ils avaient seulement convenu de certains principes dans une présentation PowerPoint.

Au cours de la semaine suivante, les équipes juridiques et commerciales ont travaillé pour mettre le PowerPoint dans un document plus contractuel. Les deux parties ont commencé à travailler sur un accord définitif avec comme objectif une date butoir fixée au 3 Septembre.

Avec tout ce qui se passait, il y avait un autre changement majeur en cours chez Microsoft : après une série complexe d’événements, Ballmer avait décidé qu’il allait prendre sa retraite en tant que PDG de Microsoft, une décision que le conseil d’administration a approuvé, y compris son puissant président et co-fondateur Bill Gates. Juste avant cette annonce, Steve Ballmer a appelé Siilasmaa et, avec sa permission, a contacté aussi Elop, pour lui annoncer cette nouvelle.

Comme les derniers jours passaient, les allers retours s’intensifiaient. Les deux sociétés essayaient de jouer sur le décalage horaire pour gagner un peu de temps en envoyant les documents le soir, d’avoir une réponse le lendemain matin.

Le dimanche 1er septembre, Steve Ballmer était dans un avion pour la Finlande. Le lundi, il y était arrivé avec tous les papiers signés par les deux parties.

L’accord était signé.

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